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Comment reconstruire
le Cambodge... et le Canada

© Copyright 1996         

DÉSILLUSION

CHAPITRE SOIXANTE-DIX

     Peu après la nouvelle du retrait des troupes vietnamiennes du Cambodge, en septembre 1989, Monty reçoit un appel téléphonique de Paris. C'est de Tha, un ami et ancien camarade d'université:
     - Crois-tu que le retrait est vraiment total?
     - Je ne sais pas! avoue la Montréalaise. Seul le temps nous le dira. Mais j'ai tendance à le croire, vu l'affaiblissement du bailleur de fonds de Hanoï, l'Union soviétique. Mais dis-moi, qu'est-ce que tu penses des dirigeants de Phnom Penh?
     - Je crois qu'ils sont d'abord des Cambodgiens avant d'être amis des Vietnamiens par nécessité politique et par affinité idéologique.
     - Pen Sovann ¹ était destitué, Chan Sy ² mourait à Hanoï et les Vietnamiens refusaient de retourner son corps à Phnom Penh, qu'est-ce que tu dis de ça?
     - Chan Sy était malade, il passait par Hanoï mais mourut à Moscou. Pen Sovann s'était montré trop proche du Kremlin. Ça prouvait qu'il y avait plusieurs tendances au sein du gouvernement, Heng Samrin fut obligé de faire l'équilibre. Si t'as suivi l'ascension de l'actuel premier ministre, Hun Sen, tu verras que le régime est quand même assez modéré et assez réconciliant.
     Monty est d'accord:
     - Ouais! Hun Sen était ministre des Affaires étrangères, et ils ont fait entrer dans le gouvernement plusieurs personnalités non communistes. On dit même qu'il y a corruption dans l'administration, ce vieux mal cambodgien!
     - Ouais! Ces «buffles affamés» qui ressuscitent à chaque régime!
     Tha crache ces mots entre ses dents, toutes lèvres retroussées. Il aurait fait de ces corrompus un... pâté de buffle s'il pouvait en attrapper un!
     - Mais attends un peu! se souvient Monty. Sais-tu que la femme de Pen Sovann est membre du comité central du Parti communiste du Vietnam?
     - Et après? Ça ne le rend pas moins cambodgien que toi ou Chey Chetha. Moi-même je suis marié à une Française!
      - Mais il a été formé à Hanoï et est imbibé d'idéologie communiste vietnamienne!
     - Et toi-même? N'es-tu pas saturée de culture occidentale? Comment aurais-tu réagi si on te disait que tu n'es plus cambodgienne?
     - Bingo! T'as posé la bonne question. Il ne faut pas que nous, Khmers, tombions dans le piège de la méfiance réciproque ou, pire, de l'élimination réciproque. C'est normal que chacun a sa croyance, son idéologie politique, ses préférences culinaires. L'important est qu'on reste cambodgien en dépit de tout.
     - Ouais! Être khmer c'est une religion! Quand on est né khmer, on sera toujours khmer!
     Le Parisien exprime sa pensée avec conviction. Monty soulève un autre mal cambodgien:
     - J'ai compris l'origine de l'inertie de la masse cambodgienne!
     - Tu parles de l'évacuation superfacile de Phnom Penh?
     - Ouais, entre autres! Si deux millions de Cambodgiens acceptaient docilement de plier bagage et quitter leur demeure, ce n'est pas parce qu'ils craignaient les AK-47 de quelques centaines de Khmers rouges, c'est parce qu'ils étaient habitués à obéir aux ordres. On n'a fait que ça depuis deux mille cinq cent ans: attendre les ordres, obéir aux ordres!
     - Ouais! Et qu'est-ce que t'as pas compris?
     - La querelle de ceux qui en donnent, des ordres! Nos politiciens se chamaillent toujours entre eux et ne parviennent pas à trouver pacifiquement des compromis rationnels... si jamais ils cherchent des compromis!

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¹ Premier homme fort du régime Heng Samrin.
² Ancien ministre de la Défense puis premier ministre.

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