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Comment reconstruire le Cambodge... et le Canada
© Copyright 1996
DÉSILLUSION
- Qu'est-ce que tu veux dire? interroge Pong. - Il m'a expliqué pourquoi il avait tout laissé tomber à Phnom Penh et venait vivre tranquillement
à Paris. Le Cambodge était au bord de la banqueroute après des années de pouvoir personnel de Samdech Ov ¹. Son Sann proposa alors à Sihanouk de changer sa
politique de "joie de vivre." L'ex-roi ne voulait rien entendre. Or, Son Sann n'était pas membre du gouvernement par courtisanerie. Il a fait HEC et était presque toute sa vie
gouverneur de la Banque du Cambodge et ministre de l'Économie. C'était un spécialiste en argent. Et quand un chef d'État n'écoute plus l'argentier sur des questions d'argent...
- L'argentier fait ses valises et bye-bye! concluent en choeur Pong et Say. - Et quelques mois après, en mars 1970, Lon Nol fit son coup d'État!
complète Monty. Say fait alors une remarque: - Ainsi la vente des médailles Sangkum n'a pas réussi à renflouer les caisses de l'État.
Tout le monde au Cambodge en portait sur sa poitrine! - Je me demande si ces mêmes caisses de l'État n'étaient pas déjà en piteux état après l'affaire
Labat! surenchérit Voraine. - L'affaire Labat? s'étonne Monty. - T'étais trop jeune pour en être au courant! rapporte Say. Plusieurs années
après son indépendance en 1953, le Royaume du Cambodge non seulement gardait intactes les institutions politiques et administratives laissées par le pouvoir colonial mais conservait aussi un bon nombre
de fonctionnaires d'origine française: des receveurs du Trésor, des proviseurs de lycée, des militaires de haut rang. Labat était trésorier de la province de Battambang. Un beau jour il a
disparu avec les millions de riels dont il avait la garde. La piste des enquêteurs mena à la Thaïlande où s'est aussi caché son complice, l'homme d'affaires Song---panich. Honte ou secret
à la cambodgienne: le public ignorait toujours le montant exact de l'argent disparu ² ! _______________ ¹ Monseigneur Papa. Appellation adulée de
Norodom Sihanouk. ² Les abus des Français au Cambodge colonial étaient innombrables. Citons l'humiliation et la dictature. a) Humiliation: Un palais
nommé Norodom à Saïgon, comme pour commémorer le cadeau de mariage de Chey Chetha aux Annamites. Refus d'employer des Cambodgiens comme main-d'oeuvre au Cambodge et importation de travailleurs annamites.
b) Dictature: À la mort de Norodom, introniser son vieux frère Sisowath plutôt que l'un de ses nombreux fils, nés de mères différentes, bâtards royaux
déplaisants autant par leurs activités contestataires que par leurs rivalités. Plus tard, la France aura imposé un autre usurpateur, cette fois un tout jeune garçon du nom de Norodom Sihanouk.
Sur le plan culturel, les Français s'octroyaient même la direction de la Bibliothèque royale plus tard Institut bouddhique. Lors des fouilles archéologiques en Cochinchine,
l'important site historique de O Kèv (Ruisseau-de-Cristal) était devenu, sous les plumes des secrétaires annamites, Ok Èv puis Oc Èv qui ne veut rien dire en cambodgien
(d'après un archéologue khmer, Hoc Cheng Siny). |
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