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Comment reconstruire le Cambodge... et le Canada
© Copyright 1996
FOLIE DES GRANDEURS
CHAPITRE CINQUANTE ET UN
Say et Monty trouvent l'hospitalité pour quelques jours chez M. et Mme Theng qu'ils ont bien connus à Montréal. Ces derniers travaillent tous les deux et possèdent
une grande maison sur la 25e rue, non loin de Memorial Drive, un grand boulevard coupant en biais la cité. Calgary est un exemple pour les villes nouvelles qui se développent très vite ou
qui ne veulent pas affubler leurs artères avec les noms de héros historiques plutôt douteux, genre Ang Non ou Ang Eng. La cité est divisée en quarts
cardinaux: SE, SW, NW, NE. Toutes les rues sont orientées nord-sud, les avenues est-ouest. La numérotation se fait à partir du milieu de la ville, les axes «zéro»
étant Centre Street et Centre Avenue. On trouve ainsi la 52e rue NE et son prolongement vers le sud, la 52e rue SE. Mais la 52e rue NW est bien à l'autre côté de la
ville. Si la 3e avenue SW coupe perpendiculairement, ou presque, toutes les rues de l'ouest de la cité, elle ne rencontrera aucune autre avenue digne de ce nom. Même un touriste ne se perdrait pas
dans Calgary, pourvu qu'il soit un peu perspicace. L'immeuble 2115, 8e rue se trouve à l'intersection de la 21e avenue. Le condo 706, 43e avenue est au croisement de la 7e rue! -
Ça n'a pas un relent raciste cette spécification: Must speak good English?¹ Monty qui parcourt dans un journal les offres de logements demande l'avis de son compagnon.
- On n'a qu'à pas y aller! maugrée celui-ci. Quelques jours plus tard les néo-Calgariens trouvent un appartement dans le district NE, près
de la route Transcanadienne, la 16e avenue. La semaine suivante, Say commence son travail de garde de sécurité dans la compagnie GSA (General Security Advisors) et Monty reçoit des lettres de
réponse de quelques firmes d'ingénieurs-conseils.
- Bonjour! Mon nom est Monty Sam. Je dois passer une entrevue avec M. Frank Petersen! La
réceptionniste fait s'asseoir la candidate à l'emploi et compose le numéro de l'interviewer. Pendant qu'elle attend, la Cambodgienne promène son regard sur la vaste salle de travail
à sa gauche. Toujours le même paysage de bureau d'études: des tables de dessin avec leurs règles coulissantes; des dessinateurs, debout ou assis, qui tracent des lignes ou aiguisent leurs
crayons. Soudain Monty reconnaît une silhouette familière dans la rangée des ingénieurs. C'est bien lui! Il n'a pas beaucoup changé: Nayan Sandhi! Le sénior à la
compagnie C., à Montréal, qui n'a pas aimé son français en été 1974. Décidément le monde est petit, même au Canada! En une
fraction de seconde toutes les images des plaisanteries stupides, tous les sons des paroles malveillantes qu'elle a vues et entendues à ses dépens à la compagnie C. reviennent à sa
mémoire. Monty veut éviter la possibilité que ces choses-là recommencent encore, décide de s'en aller et se lève. Au même moment, comme mû par un sixième
sens, Nayan lève la tête de ses papiers et regarde droit vers Monty. Il la reconnaît aussi car leurs quatre yeux semblent se dire: ah! c'est toi? Monty se détourne et prend la porte de sortie
qui est juste à sa droite, laissant pantoise la secrétaire-réceptionniste derrière son bureau. De la salle de travail, Frank Petersen vient de se montrer.
______________ ¹ Doit bien parler anglais. |
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