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Comment reconstruire
le Cambodge... et le Canada

© Copyright 1996         

FOLIE DES GRANDEURS

CHAPITRE VINGT-SEPT

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    Les deux singes de Hanuman gardant l'entrée de la Maison du Cambodge n'ont pas changé. Peut-être de couleur. Noircis par l'absence d'entretien. Ainsi que les murs et les fenêtres où sont encore visibles les traces de la «libération» cinq ans auparavant. La grande porte est évidemment fermée à clé et l'on ne peut rien voir à l'intérieur, caché par des pages de journaux collées au vitre. Soudain, à sa gauche, Monty voit quelqu'un refermer le rideau de la fenêtre de la conciergerie. Ainsi les Becker sont encore là. Ou leur remplaçant, il faut bien que quelqu'un garde le bâtiment. Pour son séjour patriotique à Paris Monty choisit encore une fois la Cité universitaire, descendant comme passagère à la Maison du Maroc. Mais son point de chute favori est chez Phatna, un ancien de la Maison du Cambodge, ancien membre de l'Association générale des Cambodgiens en France (AGCAF), un groupe proche de l'ambassade khmère, du royaume à la république, par opposition à l'Union des étudiants khmers (UEK), de tendance communiste ou socialiste, et au groupe dit Orsay, de tendances assez diverses. L'AGCAF jouissait de l'adhésion de nombreux étudiants intègres et idéalistes qui voyaient en elle une gardienne et une propagatrice de la culture khmère en France par ses fréquentes présentations artistiques à Paris et en provinces.
     Avant le 18 mars 1970 les trois groupes cohabitaient la Maison pacifiquement. Le coup d'État du général Lon Nol et la formation du FUNK par le prince Sihanouk brisèrent la cohabitation pacifique. L'UEK et la majeure partie du groupe Orsay se joignaient au FUNK, les membres de l'AGCAF, eux, flottaient. Quand le président sortant de l'AGCAF, un ingénieur en télécommunications, rentra dans la République khmère, devint ministre et se laissa prendre dans l'engrenage de la corruption, le président nouvellement élu, un ancien taupin et élève-ingénieur des ponts et chaussées (qui, soit dit en passant, a offert un petit fauteuil à Madame Monique au théâtre de la Maison internationale, cf. supra) donna sa démission. Plusieurs de ses camarades et membres adhérèrent alors au FUNK.
     C'était ainsi que d'anciens amis étaient devenus presque des ennemis mortels. Une anecdote mérite d'être racontée. Dans l'AGCAF un nommé San était un étudiant rieur et faisait rire les autres par son humour renversant. Devenu funkiste, dans la bataille qui entraîna la fermeture de la Maison du Cambodge, il brandissait un bâton avec un visage souriant mais résolu et, avant d'asséner la tige de bois sur son opposant (armé lui aussi), prenait le temps de déclarer:
     - Ceci est le bâton du peuple!
     On ne savait pas s'il s'agissait du fruit de son endoctrinement ou, encore une fois, de son humour... renversant. Mais les termes «peuple» et «masse» étaient fréquemment utilisés par les partisans du FUNK quand, dans une dispute avec les républicains, ils voulaient prendre à témoin des gens même si ces derniers n'étaient qu'une demi-douzaine:
     - Laissez voir à la masse... !
     ou
     - Le peuple doit savoir... !
     Un effort, cependant, a été fait pour rendre plus sereine l'atmosphère dans la Maison. Un débat a été organisé pour trouver le moyen d'améliorer la situation, entre intellectuels. Mais chaque camp finissait par accuser l'autre d'être borgne, ne voulant voir que le côté qui lui convenait. En pleine guerre civile ¹, la campagne électorale pour la présidence de la République opposant trois candidats (Lon Nol, In Tam, Keo An) se traduisait à Paris par la recherche de diplômés. Un congrès des Khmers à l'Étranger a été organisé dans la salle des fêtes de la Maison, avec des participants venant des principales villes françaises et d'autres cités européennes. Un ingénieur civil des ponts et chaussées, ne voulant pas être "utilisé," feignait d'arriver en retard. Mais un docteur d'État en chimie acceptait la présidence du congrès, rentrait au Cambodge et était fait membre du gouvernement.

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¹ L'idée de former une «Troisième force» avait circulé dans les milieux khmers en France. Mais elle était restée lettre morte.

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COMMANDEMENTS
REFORMING
OUR BUDDHISM
GRAMMAIRE
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GOD vs
BUDDHA
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