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Comment reconstruire
le Cambodge... et le Canada

© Copyright 1996         

IMMIGRANTE REÇUE

CHAPITRE DOUZE

     - Monty! Hé! Monty!
     Une voix masculine rauque l'appela de loin, mais assez nette et familière pour la faire se retourner sur le champ:
     - Pong!
     - Tabarnac côlice! s'écrie l'homme après s'être approché en courant. Quand est-ce que t'es arrivée, toi?
     Monty commence déjà à s'accoutumer à l'accent et aux familiarités québécois pour répondre:
     - Crème! Je ne savais pas que t'étais là, toi aussi!
     Les deux amis, étant de sexes opposés, ne s'embrassent ni ne se serrent la main comme de tradition khmère, se contentant de se sourire et se regarder comme si c'est pour découvrir les changements de l'autre.
     - Je suis arrivée il y a un mois, continue Monty après un moment. Toi?
     - Un peu plus d'un an, répond Pong, un jeune athlète de vingt-six ans, costaud, aux regards perçants. Et où est-ce que tu habites?
     - Près du parc Kent, sur Decelles.
     - Ah! Moi je suis sur la rue Closse, au métro Atwater. Écoute! Ce soir tu viens manger chez moi, je te lâcherai pas!
     - Mais je suis déjà prise! Mon amie Norim m'emmène dîner chez quelqu'un du nom de Than.
     - Quoi? Ça doit être ce Than! Il m'a pas invité, le lascar! Je connais Norim aussi. Alors voilà ce qu'on va faire!
     Et après avoir consulté sa montre Pong ajoute:
     - On va ensemble au quartier chinois acheter un canard laqué puis on se pointe chez Than. Je m'invite, c'est tout!
     Et les deux amis s'éloignent du lac des Castors, sur le mont Royal, pour aller attendre l'autobus, par un samedi après-midi ensoleillé de juillet.

*
     De tous les convives tout le monde se connaît sauf Monty. On l'introduit à Than, le maître de céans, et à Sim et Mom, deux étudiants finissant leur maîtrise à l'École polytechnique de Montréal. On s'assoit ensuite à l'indienne sur une natte en plastique étalée sur le tapis de la vaste salle de séjour de cet appartement 3½, situé à l'entresol d'une maison unifamiliale sur la rue Isabella, dans le quartier Snowdon. Than est un petit homme même pour un Cambodgien, mince, avec des lunettes de myope. Il a fait des études à Lille et est arrivé au Canada à peu près en même temps que Pong et Norim. À l'écouter, il confirme bien l'adage khmer qui dit: Plus petite est la taille, plus grande est la voix.
     - Mais comment se fait-il qu'ils en sont arrivés là? s'interroge Sim.
     On est en train de parler des événements de la Maison du Cambodge à la Cité Internationale de l'Université de Paris, survenus dix-huit mois auparavant.
     - C'est à cause de la politique! explique Pong, un ancien résident de ce foyer d'étudiants. Après le coup d'État du 18 mars 1970 et surtout après la formation du Front de Sihanouk, étudiants et stagiaires se divisaient en deux ou plutôt en trois camps: les pro-Sihanouk, les pro-Lon Nol et ceux qui n'avaient aucune raison de choisir l'un ou l'autre.
     - Et toi? T'as choisi lequel? questionne Mom.
     - Je faisais mes études, pas la politique.
     - D'accord. Mais ça n'explique pas la violence et le recours aux armes, remarque Sim.
     - C'est parce que des organisations extérieures s'en étaient mêlées, poursuit Pong. La Maison était réputée pro-Lon Nol, son directeur étant un frère du vice-président de la République khmère. Peu après le coup d'État, les gauchistes -je veux dire les gauchistes français- voulaient organiser une protestation devant la Maison pour dénoncer l'impérialisme américain et ses valets.
     - Et la guerre du Vietnam! ajoute Monty.
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