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Comment reconstruire
le Cambodge... et le Canada
© Copyright 1996
FOLIE DES GRANDEURS
Ce n'est pas une conversation de salon. Avant de l'amener devant le commissaire on a bien passé une bonne demi-heure à vérifier l'identité de la manifestante
et à téléphoner à d'autres services. Monty a bien entendu les mots RG, Renseignements généraux. Le chef policier fait seulement son travail.
- Je sais qu'il est issu d'une famille riche, répond la Khmère. Et après toute sa carrière de ministre et de gouverneur de la Banque du Cambodge, il a bien de quoi
acheter honnêtement un appartement à Paris!
Chez Phatna, rue d'Alésia, c'est le remue-ménage. Depuis l'éclatement de la nouvelle d'invasion, les associations, les groupes cambodgiens se consultent, s'interrogent,
finalement se décident et se partagent les tâches. Au CAUK revient la rédaction des communiqués de presse.
- Monty! Tu veux nous donner un coup de main?
- D'accord!
Le téléphone sonne. C'est Bernard Hamel:
- J'ai entendu dire que vous allez faire une manifestation contre l'invasion vietnamienne. Mais n'est-ce pas là un soutien à Pol Pot?
- Ça dépendra de ce qu'on écrira sur les banderoles! On condamnera en même temps les envahisseurs et les Khmers rouges!
Le dimanche 8 janvier 1978, une semaine après la nouvelle d'invasion, le défilé de Cambodgiens s'amorce donc de la Place de la République en direction de la
Place de la Bastille. Monty y participe en compagnie de quelques milliers d'autres compatriotes. Dans la multitude quelques anciens camarades de lycée au Cambodge la reconnaissent et accourent. On se
félicite mutuellement d'être survivants et on parle du bon vieux temps tout en marchant. À la Place de la Bastille quelques personnalités prononcent des discours. Mais à la
fin, en guise de vivats et en faisant allusion à la résistance anti-khmère rouge, les orateurs ne crient que:
- Vive les combattants ... tatati!
- Vive les combattants ... tatata!
Monty manque de s'époumonner: Vive le Cambodge! Vive la Nation khmère! Mais elle se ravise.
*
- Je suis ici pour chercher un leader! clame l'ex-résistant, un homme d'une trentaine d'années, taille moyenne, cheveux frisés, moustache à la Clark Gable,
plutôt beau gosse. Et le verbe facile. Dès la première minute de conversation Monty sent que l'ex-maquisard a rompu avec son groupe et qu'il vaut mieux ne pas trop l'interroger mais plutôt
écouter ses confidences. Par politesse la Montréalaise accepte son hospitalité de quelques jours dans l'appartement où il vit avec sa femme, dans la haute banlieue Nord de Paris.
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